"Portrait d'une femme romanesque Jean Voilier" Célia Bertin
Un article de journal m'a intriguée, l'auteur faisait la critique du livre de Madame Bertin et présentait Jean Voilier. J'ignorais tout de cette personne jusqu'à son nom.
Et pourtant cette femme -son vrai nom est Jeanne Loviton- a traversé le siècle (1903-1996), dans les années 20 elle a été une des rares femmes à être licenciée en droit et a commencé sa carrière d'avocat chez Me Garçon, puis elle a été journaliste et enfin romancière, elle a écrit trois romans. A la mort de son père, en 1942, elle reprend la direction des Editions Domat-Montchrestien spécialisées dans les copies de cours de droit. Elle développe sa maison d'édition en créant une branche littéraire -elle publiera Malaparte en 1948- elle devient une brillante femme d'affaires. C'est aussi une femme du monde et une séductrice, elle a été le dernier amour de Paul Valéry et a eu de nombreux amis dont Saint-John Perse et Giraudoux. Dans les années 40 elle rencontre Robert Denoël, ils espèrent se marier après le divorce de Denoël. Mais la maison Denoël a édité des écrits antisémites dont ceux de Céline et à la Libération Robert Denoël sera inculpé pour collaboration. Ils espèrent sauver les Editions Denoël, Robert sera disculpé mais son assassinat en décembre 1945 met fin à tous les espoirs de Jean Voilier. Elle devient présidente des Editions Denoël malgré l'opposition de certains auteurs, elle les vendra à Gallimard dans les années 50.
Jean Voilier avait une douleur secrète dont elle ne parlera jamais. A sa naissance, sa mère était célibataire, ce qui était toujours un déshonneur en ce début du XXème siécle. La fillette a dix ans lorsque sa mère épouse Ferdinand Loviton qui lui donne son nom. Célia Bertin montre dans son livre la solitude et la fêlure secrète de Jean Voilier malgré la réalisation de toutes ses ambitions: la richesse, l'appartenance à la haute bourgeoisie, l'admiration et l'amour des plus grands.
Une trop grande différence de générations, des romans aujourd'hui oubliés, des amis écrivains moins lus de nos jours voilà peut-être pourquoi le nom de Jean Voilier ou de Jeanne Voliton m'était inconnu.